Préparer le matériel
Peut-on vraiment être entièrement préparé à la palette d’émotions et de sensations que l’on ressent lors d'une longue aventure en bivouac et en solo ?
Je ne crois pas ! Mais il est toujours bon de préparer un maximum de choses pour se sentir plus à l’aise et avoir moins d’appréhension. Je dirais que la base, c'est d’avoir le bon matériel, de faire preuve de bon sens et de savoir lire une carte.
Familiarisez-vous avec votre matériel et, une fois que vous êtes en route, restez lucide. Vous devez apprendre à faire des choix sages et calculés et savoir reconnaître vos limites : il serait bête de les pousser trop loin. Mais c'est justement en les atteignant que vous pourrez apprendre. L'essentiel, c'est de garder sa sécurité à l'esprit.
Oui, parfois, il faut avoir du cran. Vos émotions passeront par des hauts et des bas, comme les montagnes que vous gravirez et les vallées que vous traverserez. Et vous devez vous y préparer. Il faut apprendre à accepter la peur, le soulagement, la solitude et l’exaltation, sans vous laisser perturber ni vous déconcentrer. Et surtout, vous devez apprendre à maîtriser la panique.
Mais trêve d'injonctions : une fois que vous vous êtes bien préparé, il ne vous reste plus qu’à vous lancer et à profiter de l’aventure ! La vie est trop courte pour ne pas oser. Si vous attendez les autres, vous ne partirez jamais. Mettez votre sac sur le dos et tracez votre propre chemin.
Et souvenez-vous que même si vous vous préparez du mieux possible, il y aura toujours des imprévus. C’est aussi ça, l’aventure. Sur ce, laissez-moi vous raconter ma petite balade « estivale » dans le sud-ouest de l’Irlande...
Le saut dans le vide
Imaginez-moi pliée en deux en train de lutter contre le vent, les yeux plissés dans l’obscurité et essayant désespérément de monter ma tente. Pas top comme image. J'ai à peine réussi à planter les piquets dans le sol qu'ils s'en extirpent aussitôt. La pluie est si forte qu’elle me fait mal, et tout mon matériel me glisse des mains.
En d’autres termes : j’ai la frousse !
Normalement, je n’ai pas peur de la nature. D’ailleurs, c’est souvent à la belle étoile que je suis le plus à l’aise. Mais ce soir-là, perchée sur le versant d’une montagne pendant la tempête Antoni, je me suis sentie plus vulnérable que jamais.
J’étais en pleine péninsule d’Iveragh, à environ mi-chemin du Kerry Way qui, avec ses 220 km, est le sentier balisé le plus long d’Irlande. Sur ce littoral austère, les tempêtes sont fréquentes, et j’ai pris la pluie presque constamment depuis le début. Mais pour une campeuse équipée aussi légèrement que moi, cette nuit-là a été particulièrement difficile.
J’ai appris une semaine plus tard que les rafales avaient atteint les 100 km/h sur les sommets et les côtes les plus exposés, et cela ne me surprend pas. Trempée et désespérée, dans une obscurité accablante, j’ai remis en question mes choix de vie, maudissant mon incapacité persistante à passer des vacances « normales ».
Après avoir protégé ma tente du mieux que je le pouvais, je me suis blottie dans mon sac de couchage, croisant les doigts pour que tout se passe bien. La tente bougeait si violemment que je ne pouvais ni dormir, ni cuisiner. J’étais à une journée de marche de la civilisation, morte d’inquiétude. Je pensais que la toile de ma tente allait se déchirer et que j’allais finir trempée, dans l’obscurité totale. J’ai ressenti une détresse tellement profonde que j’en ai eu la nausée.
Mais par miracle, au petit matin, la tente était intacte. Mon calme et ma débrouillardise avaient porté leurs fruits ! Je dois avouer qu’à ce moment-là, je me suis sentie quasiment invincible. J’ai fait mon sac à dos et je me suis remise en marche, fière d’avoir survécu seule à la tempête.
Savoir profiter
Le concept de « défi » est souvent lié à la vitesse, à la distance ou au type de terrain. Mais quand on voyage en solo, on peut se fixer ses propres objectifs, et à moins qu’il ne s’agisse d’une vraie course, il ne faut pas oublier d'en profiter. Après tout, vous êtes en vacances, et vous n'avez rien à prouver à qui que ce soit, hormis peut-être à vous-même.
À ce moment-là, je ne savais pas encore que mon paisible déjeuner sous un chêne le premier jour allait être le plus grand luxe de mon voyage. Ce jour-là, je n’ai marché que la moitié de ce que j’avais prévu. J’ai préféré profiter du beau temps avant le retour de la tempête. Et je suis contente de l’avoir fait, parce que les cinq jours suivants ont été désastreux. Je n’avais jamais autant marché sous la pluie de ma vie.
La leçon à retenir ici est : profitez de chaque instant !
Le lendemain, ce fut une épuisante marche de 9 heures contre des vents violents et sous une pluie battante. Du coup, quand j'ai trouvé un endroit plat vers 18 heures, j’ai installé mon campement un peu plus tôt que prévu.
Le camping sauvage*, bien qu'interdit dans de nombreux pays, est couramment pratiqué par les randonneurs au long cours et généralement toléré en montagne. À proximité d'habitations, il peut être difficile de trouver un endroit discret, donc étudiez attentivement votre carte (notamment les pentes et les types d'occupation des sols) et donnez-vous suffisamment de temps. Il n'est guère agréable d’avoir à chercher un emplacement adéquat à la tombée de la nuit après une longue journée de marche.
* Il faut savoir que le camping sauvage peut vous faire vous sentir très seul. Si vous randonnez en autonomie, transportez toute votre nourriture et filtrez votre eau, vous pouvez facilement passer des journées entières sans voir personne. Si vous ne l’avez encore jamais fait, réfléchissez-y à deux fois.
En camping sauvage, vous devez absolument avoir une méthode toute prête pour monter votre campement et organiser votre sac en cas de pluie, parce que garder vos affaires au sec est crucial. Malheureusement, nous ne sommes pas des grenouilles, donc réfléchissez bien à la façon dont vous allez vous changer sans laisser entrer la pluie dans votre tente pendant que le ciel s’acharne sur vous.
Mon conseil est d’utiliser deux sacs pour tout. Les sacs étanches(S'ouvre dans une nouvelle fenêtre) sont vos meilleurs amis. Je ne partirais jamais en randonnée sans eux, aussi « prometteuses » que soient les prévisions météo. La plupart des bons sacs à dos sont vendus avec une housse imperméable(S'ouvre dans une nouvelle fenêtre), mais pour être totalement protégé, il faut aussi un sac étanche (à titre personnel, j’utilise le modèle 100 L d’Osprey(S'ouvre dans une nouvelle fenêtre)). Une astuce : vous pouvez comprimer vos sacs étanches Osprey pour qu'ils soient hermétiquement fermés et ainsi optimiser le volume de votre sac à dos.
La façon dont vous organisez vos affaires compte aussi : mieux vaut ne pas avoir à tout sortir sous la pluie pour trouver votre tente. Mais vous ne trouverez la bonne technique qu’après avoir passé plusieurs jours sur les sentiers.
Le lendemain matin, fin prête à affronter la pluie, j’ai traversé une vallée avec des tas de blocs et de vieux murs en pierre. Un peu plus bas, un berger guidait son chien à l’aide de méthodes ancestrales. Le chien répondait à ses ordres mystérieux, telle une ombre furtive slalomant parmi la laine blanche des moutons.
À mon passage, il s’est arrêté pour me parler, apparemment ravi de tomber sur quelqu’un. Et je l’étais moi aussi, puisque je n’avais vu personne pendant deux jours d'affilée. Je n'avais jamais entendu quelqu'un parler anglais comme ça. Non sans mal, j'ai compris qu'il était curieux du monde extérieur : nous avons parlé du Brexit, de la flambée des cours des produits alimentaires et des conséquences de la guerre en Ukraine. Ses yeux larmoyants et son visage marqué par les intempéries semblaient directement sculptés par son environnement, comme si le temps s’y était arrêté. Certaines personnes ne s'éloignent jamais des fermes qui les ont vu naître. Sa génération pourrait bien être la dernière de ce genre.
Pendant plusieurs kilomètres, j’ai entendu la voix et l’accent du berger résonner dans ma tête, rattrapée par un sentiment de mélancolie à l'égard du monde moderne où les transports, la technologie et la connectivité ont renversé les pratiques traditionnelles et les modes de vie simples. En revenant à la monotonie de la vie sur les sentiers, il est facile de ruminer des pensées de ce type. Vous réévaluez ce qui compte vraiment dans la vie et rentrez chez vous en voyant les choses sous un autre jour.
Pendant six jours sur neuf, mes chaussures étaient imbibées d’eau. Mais cela ne m'a pas dérangée plus que ça parce qu'en chemin, je suis devenue invincible. Le poids sur mon dos (23 kg !) ne me faisait plus mal, mes jambes étaient plus fortes et mes vêtements trempés n’avaient plus d’importance. Mais même au plus fort de mon mental, je redevenais une joyeuse enfant quand les intempéries marquaient une pause.
Cet après-midi-là, on pouvait apercevoir les îles Skellig à l’horizon chargé. Au loin, leurs sommets galbés, mystérieux mais très caractéristiques, transperçaient le ciel gris. J’ai immédiatement compris pourquoi les artistes s’en inspiraient : j'ai moi-même été saisie par ces lointains rochers aux angles irréguliers qui surfaient sur les vagues déferlantes de la mer.
Soudain, une petite tache bleue est apparue dans le ciel, et un rayon de soleil a effleuré mon visage. C’était un moment de pure magie. Comme si le ciel me tendait la main pour me remonter le moral et me faire avancer vers la lumière. Je me suis assise là où j’étais pour en profiter au maximum.
Impossible de décrire ce que ce rayon de soleil m’a fait ressentir. C’est fou comme une si petite joie peut vous remplir d’espoir, de gratitude et de vitalité. À ce moment-là, je me suis souvenue pourquoi j’aimais l’aventure, pourquoi j’étais assise là, dans la boue, toute seule au milieu de nulle part, sans me soucier à un seul instant de la saleté. Eurêka ! Je me suis souvenue de pourquoi j’étais là.
C’est drôle à quel point un simple rayon de soleil peut tout changer en un instant. C’est peut-être pour cela que je trouve les longues randonnées en solitaire si précieuses. Parce qu’elles vous donnent la possibilité de regarder à la fois autour de vous et à l’intérieur de vous. C’est un voyage qui se fait à l’extérieur et à l’intérieur.
Mon conseil ? Mettez tout ce dont vous avez besoin pour survivre dans votre sac à dos (c’est probablement beaucoup moins que ce que vous imaginez) et lancez-vous ! C’est vraiment très gratifiant. Vous êtes plus solide que vous ne le pensez !
Le sac à dos: Osprey Kyte 68
Pour ce voyage, j’ai poussé le Osprey Kyte 68 L(S'ouvre dans une nouvelle fenêtre) dans ses retranchements, et il a bien tenu le coup. J’ai particulièrement apprécié ses poches extérieures extensibles pour petits objets et le fait de pouvoir ouvrir la poche supérieure sans enlever le sac à dos.
Les bretelles et la ceinture rembourrées étaient un véritable luxe. L’ajustement était idéal, ce qui m’a agréablement surprise, parce qu’en général les sacs à dos pour femme (et pour homme) ne me vont jamais parfaitement bien. Pour les femmes, Osprey propose deux longueurs de dos différentes, ce qui a fait toute la différence pour moi qui suis grande et qui ai les épaules larges. Il va sans dire que le sac à dos peut être réglé à tous les niveaux pour créer un ajustement personnalisé. Après en avoir réduit le poids au maximum, je pouvais à peine le sentir sur mon dos.
Il est doté d’un système de réservoir intégré très utile en déplacement (mais pensez à emporter un réservoir supplémentaire si vous campez, avec lequel il est plus facile de remplir une casserole qu’avec un tuyau de réservoir). Des boucles pratiques permettent d’attacher des objets à l’extérieur, et j’ai adoré la couleur prune, qui se fondait dans le violet et le vert de la bruyère et me permettait de me déplacer furtivement dans la nature, sans être repérée de loin. C’est le sac à dos idéal pour partir à l’aventure !